Le S&OP (Sales and operations planning) ou PIC, en français, est devenu la norme pour beaucoup d’entreprises et les retours d’expérience sont nombreux. Cependant, les résultats ne sont pas toujours présents, quelles sont les erreurs à éviter ?
Rappel : le S&OP est un processus décisionnel mensuel
Les bénéfices théoriques du S&OP sont bien connus : réduction des silos et développement de la collaboration transverses entre directions, augmentation du taux de service, lissage des activités de production, réduction des urgences…
Alors pourquoi les bénéfices attendus ne sont pas toujours au rendez-vous ? Comment se fait-il que le processus S&OP finisse parfois par ressembler à un simple arbitrage charge/capacité court terme, ou une énième instance de reporting sans prise de décision ?
Nous allons voir quelques pistes, mais d’abord, rappelons que le processus S&OP est un processus décisionnel au rythme mensuel permettant de :
- Confronter de façon régulière les projections de la demande sur le portefeuille de produits/services, avec les capacités disponibles pour servir le marché
- Définir et décider du meilleur scénario pour réaliser le business plan de l’entreprise avec la plus grande agilité possible
Les 6 facteurs clé d’un processus S&OP réussi
1. Mettre le dirigeant au cœur du processus
Le S&OP propose un cadre structuré pour la prise de décision à chaque étape de son déroulement. Ce n’est jamais une seule personne, mais une équipe représentant différentes fonctions qui prend des orientations en cohérence avec la stratégie de l’entreprise.
Mais, in fine, c’est le dirigeant de l’entreprise, présidant la réunion Executive S&OP, qui arbitre entre les propositions réalisées par ses équipes et prend la décision finale. Si le dirigeant est trop souvent absent de cette réunion, ou s’il y voit peu d’intérêt, c’est qu’elle n’est pas au bon niveau. Il est indispensable de ne pas rentrer dans le détail des prévisions de chaque produit, ni de détailler toutes les analyses capacitaires. Il s’agit de prendre de la hauteur, étudier les risques et oppportunités qui vont impacter l’entreprise sur les horizons temporels court, moyen et long terme, et s’assurer que la direction prise est en phase avec la stratégie.
La réussite dans la mise en œuvre d’un S&OP passe obligatoirement par un sponsoring fort de la direction générale, cliente du processus, qui va assurer, chaque mois, la mobilisation, de l’ensemble de l’organisation pour dérouler les boucles S&OP. Sans ce soutien et cette « saine pression », le processus va s’essoufler et probablement finir par disparaitre ou être dévoyé, sans délivrer tous ses bénéfices.
2. Être orienté décision
Le travers classique d’un S&OP est d’être une simple réunion de reporting des équipes vers leur direction générale, sans proposer différentes visions ou alternatives, et donc sans prise de décision.
Si ce mode de fonctionnement peut au départ avoir la vertue de consolider une vision de la situation de l’entreprise d’un point de vue commerciale et industrielle, elle va très vite montrer des limites, et les participants vont s’en désintéresser, en la voyant comme source de charge de travail, n’apportant pas de gains pour leur activité. C’est le principal facteur qui fait abandonner le processus S&OP et qui fait dire à certains que ça ne peut pas marcher chez eux.
La bonne pratique est de raisonner par scénario. Chaque évènement sur un marché, chaque contrainte capacitaire, chaque changement dans les prévisions, est porteur d’opportunité ou de risque pour l’entreprise qui peut y répondre par plusieurs options. Ces différentes options doivent être détaillées, évaluées et proposées pour une prise de décision collective. On évite ainsi les décisions prises unilatéralement par une direction qui peuvent impacter les autres, on s’engage collectivement et on ne peut plus rejeter la faute sur d’autres si les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous.
Si on prend un exemple d’actualité pour illustrer ce propos : les ruptures fournisseurs. Selon le plan de livraison d’un fournisseur de composant critique pour la fabrication de votre produit, il est intéressant d’évaluer les différentes solutions d’allocation de ces composants : vers les produits les plus rentables à court terme, ou vers les produits statégiques à long terme, ou vers les clients les plus exigeants dont les contrats sont bordés avec des pénalités de retard…On peut aussi tenter de substituer avec un autre fournisseur à terme, ou anticiper des ruptures futures en faisant des stocks aujourd’hui qui pèseront sur le cash….Chaque option fait sens, il s’agit de trouver celle qui optimisera le mieux le tryptique : satsifaction client, cash et marge.
3. S’assurer de l’adhésion des équipes
Le processus ne demande pas de savoir technique avancé, mais il requiert de la collaboration, de la transparence, et un dépassement des intérêts de chaque direction au profit de celui de l’entreprise. C’est donc un changement fondamental pour les entreprises qui travaillaient jusque-là en silo, ou chacun optimise son périmètre, parfois au détriment des autres.
Aussi, afin de fédérer les équipes autour du projet et apporter une animation transverse, il est nécessaire de nommer un « champion S&OP », quelqu’un ayant une vision globale de l’entreprise, une connaissance des différents acteurs, une autorité naturelle permettant d’assoir la légitimité du processus. Cette personne fait bien souvent partie des directions commerciale ou Supply Chain qui pilotent traditionnellement le S&OP mais ce n’est pas un critère obligatoire. Il faut avant tout qu’elle sache embarquer l’organisation dans cette nouvelle démarche.
Au-delà de la création de ce nouveau rôle, il faut s’assurer que chacun comprenne parfaitement l’intérêt de ce processus S&OP. S’il met de nouvelles contraintes de structuration et nécessite un temps de préparation non négligeable, il doit apporter une véritable plus value dans la prise de décision. Il doit permettre d’impacter positivement les indicateurs clé de son organisation (taux de service client, optimisation du BFR, maitrise des coûts…).
Pour cela, une formation des équipes est indispensable pour bien comprendre à quoi sert un S&OP, quels avantages doit-il procurer, et comment il fonctionne. Un serious game peut être une bonne idée dans une approche luidique et participative.
4. Fiabiliser la prise de décision
Le S&OP fait appel à beaucoup de données qui sont fournies par toutes les fonctions de l’entreprise. Si elles ne sont pas fiables, pas à la bonne maille, ou incomplètes, le processus perd de sa légitimité et de son sens, et la prise de décision est plus difficile.
Il y a un travail majeur à faire avec les équipes IT pour construire les bonnes bases de données et les moyens de les extraire pour faciliter ce travail à terme.
Mais, l’autre volet pour faciliter la prise de décision porte sur la formulation et le partage des hypothèses. Aucune projection n’est pertinente si elle ne s’appuie pas sur des hypothèses documentées et validées par tous.
Il n’est nul besoin de questionner un chiffre si l’hypothèse n’a pas été discutée au préalable. Peut-on vraiment valider une prévision qui affiche 20% de croissance sur un trimestre, si on ne sait pas qu’il y a derrière ce chiffre un deal important dont la probabilité est de 50% de gain. En précisant cette hypothèse, on estime mieux le niveau de risque que l’on prend, et on peut le challenger. On rentre alors dans une véritable discussion à valeur ajoutée.
5. S’appuyer sur des outils performants
Le lancement d’un processus S&OP s’appuie presque toujours sur des outils Excel customisés. Mais passée la période de mise en œuvre, quand le processus s’est stabilisé, il faut industrialiser les modes de fonctionnement en passant à des outils plus structurés.
Les outils du marché sont nombreux et sont à classer en 2 catégories :
- Les outils de Business Intelligence de type boîtes à outils permettant de construire son processus sur mesure : Anaplan, Board,…
- Les outils spécialisés dans le S&OP proposant une approche structurée : Colibri, Dynasis, SAP IBP, FutureMaster…
Ces outils doivent inclure certaines fonctionnalités incontournables :
- Collaboratifs, en étant accesibles par l’ensemble des fonctions impliquées
- Rapides, en structant la prise de décision avec des workflows supportant les étapes du processus
- Visuels, en offrant un affichage consolidé des données sous forme graphique mais permettant de plonger dans le détail si besoin avec plusieurs niveaux d’agrégation de la donnée
- Dynamiques, en permettant de structurer la réalisation de scénarios, de simuler différentes options rapidement pour développer une certaine agilité dans la réponse aux évolutions des marchés
6. Rentrer dans une démarche d’amélioration continue
Une fois le processus déployé sur l’ensemble du périmètre, il ne faut pas croire que le travail est terminé. Le processus S&OP peut s’essoufler après un certain temps, la participation aux réunions s’étioler.
On peut avoir l’impression d’avoir atteint un plafond de verre difficile à dépasser car les outils ne permettent pas de faire mieux, les données pertinentes manquent, les urgences court terme prennent le dessus…
Il est nécessaire de régulièrement auditer le processus pour évaluer le niveau de maturité de l’organisation, identifier les potentielles améliorations court terme, ou long terme qui permettront d’être plus performant, et suivre leur mise en oeuvre.
Une grille de maturité listant toutes les bonnes pratiques est un bon outil pour évaluer la situation existante et fixer un objectif de maturité à atteindre.
Le mot de la fin
Si votre processus S&OP vous semble peu efficace, penchez-vous sur chaque point listé pour trouver les pistes d’amélioration de votre processus. Chez Alkemys Consulting, nous pouvons vous aider à obtenir les bénéfices du processus S&OP en actionnant les bons leviers à travers un diagnostic préliminaire de maturité, des accompagnements personnalisés de mise en œuvre ou des formations via notre serious game Choc&Pic !