Vos projets patinent, les délais s’allongent alors que vous augmentez les ressources qui y sont allouées. Comment combattre ce fléau bien connu dans le monde projet ? En identifiant où sont les goulots d’étranglement dans l’organisation qui limitent la capacité à délivrer plus rapidement. En complément, il faut mettre en place des solutions pour optimiser leur utilisation.
L’une des solutions existantes, c’est la Gestion de Projet par la Chaîne Critique. Basé sur un concept simple, elle s’appuie sur la théorie des contraintes appliquée au monde projet pour libérer les goulots. Reprenons depuis le début.
Qu’est-ce qu’un goulot en Gestion de Projet ?
Un goulot d’étranglement est un poste de travail qui reçoit plus de charge que ce qu’il peut traiter à sa capacité de production maximale. Cela provoque des interruptions du flux ou des retards dans le processus de production.
S’il est facile de visualiser ce qu’est un goulot sur une ligne de production, on voit plus difficilement ce que cela signifie dans un environnement de Gestion de Projet. Cela est dû à la nature parfois intangible de ces activités. Le goulot d’étranglement est moins visible, mais pourtant, tout aussi structurant dans la capacité à livrer à l’heure. En effet, la capacité du goulot dicte la capacité de l’ensemble du système à délivrer. Augmenter la capacité des ressources non goulots est sans effet sur la capacité globale du système.
Dans un projet, les goulots d’étranglement sont les ressources les plus sollicitées sur le chemin critique des projets. Le goulot sur un projet ne sera pas forcément le goulot à l’échelle de l’organisation.
La nature des goulots est très variable et ne se limite pas aux ressources humaines identifiées nominativement. Le goulot peut être une compétence (ex : développement informatique), une machine ou un outillage (ex : un banc de test utilisé en phase de validation d’un développement produit), un prestataire (ex : le BE réalisant des notes de calcul), mais aussi le manager débordé qui valide toutes les décisions de ses équipes.
Il devient donc évident qu’il faut savoir identifier et traiter les goulots sur vos projets si vous souhaitez accélérer leur débit.
Comment identifier vos goulots d’étranglement ?
Un goulot génère des files d’attente qu’il faut savoir détecter si on veut les réduire. Dans un projet, la notion de file d’attente ou stock se matérialise par des temps d’attente plus longs à une étape du projet, ou, des dossiers en attente sur le bureau d’une ressource. Instinctivement, par expérience on connaît bien ceux qui sont toujours surchargés, qui génèrent des retards.
Il faut néanmoins garder un œil critique sur l’analyse de la charge de chacun, car des ressources non identifiées dans les plans projets (management, machine…) peuvent passer en dessous des écrans radar et pourtant se révéler critiques (ex : une création de références article).
De plus, le goulot peut être tournant, selon le type de projet, il change et il est alors difficile de bien l’identifier !
Deux approches pour repérer les goulots d’étranglement :
- La solution empirique : basée sur l’expérience et la vision des ressources toujours surchargées et en retard
- La solution analytique : Lors de la planification de l’ensemble du portefeuille projet avec les ressources associées, construisez un plan de charge prévisionnel grâce à des outils de gestion de projet. Et à ce moment là, il est possible d’identifier clairement là où ça coince.
Cependant, attention ! Cette vision peut être incomplète si on ne tient pas compte des projets en attente de lancement. Ils pourraient changer la donne en terme de ressources. L’important, ici, c’est la tendance d’évolution de la charge et non la situation à l’instant T.
Comment optimiser l’utilisation de vos goulots pour accélérer vos projets ?
1/ Le goulot est le tambour qui définit la cadence
Une fois les goulots d’étranglement identifiés, il faut avant tout chercher à subordonner toutes les autres ressources à cette contrainte. Le goulot est le tambour qui définit la cadence. Pour ce faire, il faut assurer leur alimentation sans rupture, sans générer des attentes qui mettraient le projet en retard. Le chef de projet a un rôle majeur, il s’assure que le passage de relais se fait de façon la plus optimisée possible. Il sonne l’alerte auprès des autres ressources à chaque fois qu’une ressource critique doit démarrer une nouvelle tâche.
2/ Un système de buffers pour protéger le projet.
Le système des buffers (ou tampons) est utilisé pour protéger les ressources critiques. La Gestion de Projet par la Chaîne critique (ou CCPM Critical Chain Project Management) introduit cette notion et définit un cadre structuré de mise en œuvre. Un buffer projet et des buffers auxiliaires permettent d’absorber tous les aléas des tâches sur le chemin critique (ex : par livrable plus détaillé que prévu ou un collègue en maladie). C’est comme un système assurantiel collectif qui mutualise les gains et les pertes.
3/ Préserver les ressources critiques
On peut également rendre tangible ce qui ne l’est pas forcément en identifiant visuellement les ressources critiques d’un projet . Cela peut prendre la forme d’un objet symbolique posé sur le bureau ou un statut particulier sur les outils de chat interne. L’objectif est de signaler aux autres ressources le caractère critique du travail réalisé. Et ainsi, limiter les dérangements au strict nécessaire.
4/ Desserrer la contrainte directement sur les goulots d’étranglement
Lorsque l’on s’est assuré que l’alimentation des ressources goulot est optimisée, on peut s’atteler à desserrer la contrainte en menant des actions sur le goulot lui-même. À court terme, il est possible de revoir le plan projet et les enchainements pour mieux utiliser les ressources. Augmenter le nombre de ressources sur une tâche donnée est aussi une option. A plus long terme, des investissements peuvent être menés pour augmenter la capacité des goulots (achat d’outils informatiques, formation, recrutement, …).
Plus globalement, il est important de se mettre dans une démarche d’amélioration continue, en analysant systématiquement les causes de retard ou consommation des buffers pour définir un plan d’action permettant de limiter la contrainte.
Les pièges à éviter
L’approche classique de management des ressources vise à optimiser leur utilisation en allouant un nombre important de tâches pour être sûr de les occuper à 100%. Cette pratique a des effets pervers.
La première règle consiste à ne pas « polluer » vos ressources critiques avec des tâches accessoires, des réunions non indispensables, des reportings inutiles , il faut bien entendu les concentrer uniquement sur les tâches projet critiques. Facile à dire, encore faut-il avoir une bonne vision sur les ressources critiques !
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Il est tentant de vouloir toujours augmenter le nombre de tâches gérées en parallèle pour chaque ressource mais cette pratique est contreproductive. Le multitâche génère des temps de commutation entre les tâches (équivalent du temps changement de série en production) avec des pertes de temps considérables à la clé (estimées entre 30% et 50%).
Pour les ressources non goulots, attention également à ne pas brouiller les priorités. Elles doivent tout faire pour ne pas rompre l’approvisionnement des ressources critiques. Or la tentation est grande de vouloir les « occuper » au maximum au risque de les détourner de leur objectif premier. L’entraide avec les ressources goulots, la mise en place d’action d’amélioration continue pour desserrer la contrainte sont des tâches plus pertinentes à assigner pour accélérer les projets.
Enfin, la pratique qui consiste à lancer un trop grand nombre de projets en même temps sans se soucier de la capacité des ressources critiques à délivrer est néfaste (ex : « plus on lance de projet, plus il y a de projet qui ont une chance d’aboutir »). Elle génère du multitâche, source d’inefficacité, des temps d’attente et rend les arbitrages difficiles entre les projets. Il faut s’assurer de la disponibilité des ressources critiques avant de lancer tout nouveau projet, ce qui va permettre d’augmenter la rapidité d’exécution.
Les projets en retard ne sont plus une fatalité, nous pouvons vous aider à lancer votre démarche d’amélioration avec des résultats visibles en quelques mois.